19 Sep Notion de physique thermique
Les punaises de lit sont des nuisibles difficile à éradiquer et refont leur apparition dans l’hexagone de manière exponentielle depuis maintenant une vingtaine d’années. Heureusement, différentes techniques peuvent être mise en place pour lutter contre et l’utilisation de la chaleur est une solution prometteuse. Mais pour cela, il est important de maîtriser les phénomènes physiques reliés à la thermique et la mécanique des fluides afin d’améliorer les procédés d’éradication par échauffement. Pour simplifier l’appréhension des lois physiques qui entrent en jeu dans ce type de traitement, nous les exposerons principalement sur le cas simple d’une étuve en abordant les concepts de convection (écoulement d’un fluide), conduction et résistance thermique. Nous tenterons ensuite de transposer ces lois physiques fondamentales sur le chauffage d’une pièce complète avec un générateur à air chaud.
1. TRAITEMENTS THERMIQUES ET PUNAISES DE LIT :
Depuis les années 1950, des milliers d’articles scientifiques ont été publiés sur l’élimination des punaises par traitement thermique, mais d’importantes variations dans les résultats sont constatées.
Publiée en 2011, l’étude de Stephen A. kells & Mickaël J. Goblirsch remet en perspective l’ensemble de ces variations et apporte une notion de choc thermique (rapidité de montée en température) qui explique en grande partie ces contradictions.
Selon cette étude, la létalité est immédiate sur tous les stades, lorsque les matériaux atteignent 55°C. Sinon, il faut maintenir les matériaux pendant près de 72 minutes à 48°C pour une éradication totale. Nos tests en conditions réelles ont permis de confirmer ces valeurs (J.M. Berenger et C.Thénoz 2021).
2. LA CONVECTION THERMIQUE :
La convection thermique concerne l’échange de chaleur entre un fluide en mouvement et son environnement.
Dans notre cas, ce sera la répartition de la chaleur par circulation d’air dans toute l’enceinte de la zone de traitement afin de chauffer l’intérieur de manière homogène.
Comme pour la cuisson dans votre four à la maison, vous remarquerez que votre poulet est rapidement doré à l’extérieur alors qu’il n’est pas cuit à l’intérieur.
Le phénomène qui permet une cuisson homogène de l’extérieur de votre poulet dans votre four grâce à la chaleur tournante est le principe de convection.
La cuisson progressive de l’extérieur vers l’intérieur est un autre principe physique : la conduction thermique.
3. LA CONDUCTION THERMIQUE :
La conduction thermique est la capacité d’un matériau à conduire la chaleur d’un bout à l’autre. Certains matériaux conduisent plus ou moins bien cette chaleur.

La conduction thermique est la capacité d’un matériau à conduire la chaleur d’un bout à l’autre. Certains matériaux conduisent plus ou moins bien cette chaleur.

Voilà pourquoi il peut y avoir d’importants écarts de 5. température à l’intérieur de l’étuve. L’air est un bon conducteur de chaleur lorsqu’il est brassé et chauffé. A l’inverse, c’est un excellent isolant lorsqu’il est immobile, comme entre deux plaques de verre dans votre double vitrage. A titre de comparaison, cet air immobile est environ 15 000 fois moins conducteur que le cuivre !
Ainsi dans l’exemple ci-dessus, une bonne compréhension du principe de convection nous permet de trouver comment répartir au mieux la chaleur dans toute la zone de traitement via le brassage de l’air. Aussi, le principe de conduction s’applique à la chauffe progressive de l’intérieur des sacs. Il est donc crucial de maîtriser la physique de ces phénomènes.
4. AMÉLIORATION DU TRANSFERT THERMIQUE, APPLICATION EN CONDITIONS RÉELLES :
« Pourquoi supprimer les cartons lors des traitements thermiques ? »
Dans le test ci-dessous, nous avons disposé deux bols remplis d’eau bouillante, l’un d’eux disposé à gauche dans un carton clos (1). L’autre disposé à droite dans un sac-poubelle de 75 Microns d’épaisseur (type sac à gravats) disposé dans une caisse plastique ajourée (2). Le volume, la température de l’eau et le contenant (bols) sont identiques (1 et 2).

La photo de droite a été réalisée avec une caméra thermique où la couleur rouge représente les zones les plus chaudes. Nous remarquons que la chaleur se diffuse beaucoup plus rapidement au travers du sac (à droite). Par contre le carton de gauche n’a quasiment pas de zones rouges (zones les plus chaudes) et ceci malgré 15 minutes d’attente.
Le carton conduit mal la chaleur car il piège un grand volume d’air qui ne peut circuler (convecter). Il se comporte comme un isolant. Il sera donc plus difficile d’y éliminer les punaises potentiellement présentes à l’intérieur.

En disposant les sacs précédents dans un chariot avec un espace de 50 mm seulement entre chaque étage, les transferts thermiques par conduction et convection sont considérablement améliorés. La circulation de l’air entre les objets est facilitée en supprimant l’effet isolant des cartons.
En disposant les sacs précédents dans un chariot avec un espace de 50 mm seulement entre chaque étage, les transferts thermiques par conduction et convection sont considérablement améliorés. La circulation de l’air entre les objets est facilitée en supprimant l’effet isolant des cartons.
5. LA RÉSISTANCE THERMIQUE :
Allons plus loin dans la compréhension des transferts de chaleur, non pas dans l’air mais dans les matériaux (solides) comme un objet, un meuble ou encore un mur. Il est très important de considérer la capacité de ces matériaux à résister à l’échauffement qu’on appelle classiquement la résistance thermique, dont on peut faire l’analogie avec une résistance électrique par ailleurs.

Pour des matériaux identiques (cubes et rectangles), donc de conductivité identique, plus l’épaisseur à traverser est grande et plus le matériau résiste au passage de la chaleur proportionnellement à l’épaisseur (températures de droite). Plus le matériau est épais plus il sera difficile de chauffer son autre extrémité. Associer l’épaisseur du matériau à sa conductivité thermique, vue précédemment, nous permet donc de considérer sa résistance thermique.
6. LA MÉCANIQUE DES FLUIDES :
Enfin, vis-à-vis du chauffage d’une pièce par circulation d’air chauffé, 2 phénomènes importants liés à la circulation de l’air (mécanique des fluides) peuvent nous empêcher de chauffer de manière homogène une pièce.
Déjà, l’air chaud monte, et les montgolfières le savent très bien. Il sera donc difficile de chauffer le sol et le plafond pourrait devenir brûlant. De plus l’air chauffé s’approchant des parois va ralentir en frottant sur les surfaces de la pièce ou des meubles. Ceci va entraîner la formation de ce qu’on appelle une couche limite où les transferts de chaleur vont être réduits.
Cette couche limite peut être très fine, inférieure au millimètre le long d’un mur. Mais elle peut aussi être problématique lorsqu’un mur présente des fissures où peuvent se cacher les punaises de lit et où l’air va mal circuler ou encore avec les angles d’une pièce notamment où les effets ne sont alors plus négligeables.
7. OPTIMISATION DE L’ENSEMBLE DES LOIS PHYSIQUES ÉVOQUÉES :
Dans l’exemple ci-dessous, avec un volume à traiter identique entre la photo de gauche et celle de droite, nous avons amélioré les échanges de chaleur par convection en permettant à l’air de circuler en modifiant le conditionnement et en injectant l’air chaud par dessous. De plus, nous avons diminué la résistance thermique des objets à traiter en supprimant les cartons et en diminuant le volume d’air piégé. Les résultats indiqués sur la durée du cycle sont alors sans appel.


8. APPLICATION AU CHAUFFAGE D’UNE PIÈCE :
Avec toutes ces connaissances acquises, imaginons la composition d’une pièce :
- Nombreux angles causés par le mobilier = limite l’échauffement par convection thermique
- Mauvaise circulation d’air à l’arrière de ces meubles = convection affaiblie
- Nombreux objets différents, matières différentes = conductivités différentes
- Objets de même matériaux avec des épaisseurs différentes = résistances thermiques différentes
- Punaises contaminant fréquemment les réseaux électriques, donc transitent facilement dans les cloisons en plaque de plâtre = échanges thermiques complexes
- De l’air immobile emprisonné à de multiples endroits = isolation thermique

Tous ces paramètres ne favorisent pas l’homogénéisation de la température dans une pièce. Or les punaises de lit sont plutôt cachées dans des interstices où la chaleur a du mal de circuler.
Il semble difficile de parvenir à une élimination totale des punaises de lit sans une importante préparation de la pièce avant la mise en place d’un traitement thermique par générateur à air chaud, même en présence de ventilateurs d’appoint correctement disposés.
Pour compenser ces difficultés, la surchauffe de la pièce est fréquemment réalisée avec des températures atteignant parfois les 70°C dans l’air.
Ces températures, maintenues de nombreuses heures, peuvent assécher fortement les objets contenus dans la pièce tout comme les murs.
Ne pas prendre en compte une variation brutale du taux d’humidité des matériaux augmente considérablement leur risque de rupture, parfois plusieurs jours après la montée en température.
TECHNIQUE SIMPLE, FIABLE ET FACILEMENT REPRODUCTIBLE ?
Nous avons vu dans cet article que de nombreux principes physiques entrent en jeu. Bien que nous puissions améliorer les traitements thermiques par compréhension des lois physiques, celles-ci sont immuables et souvent insuffisamment maîtrisées.
Le traitement thermique fonctionne oui ! Mais il reste difficilement adaptable à tous les chantiers, en fonction de l’encombrement, de la charge parasitaire et de son ancrage dans la structure du bâti. Il demande finalement autant d’adaptabilité qu’un autre type de traitement.
L’utilisation d’un matériel performant, pilotable avec un automate, facilitera considérablement les choses. Mais la question restera donc, où disposer les sondes de température pour être sûr d’atteindre une létalité complète ?
Une caméra thermique de qualité complétera sans nul doute la trousse à outils du spécialiste de ce type de traitement, une solide formation en physique thermique appliquée sera également indispensable !
